Elue municipale pour la première fois à 40 ans, non-encartée dans un parti politique et n’ayant pas fait science po, je découvre avec étonnement le fonctionnement des mandats locaux… et ce qui va avec! Adjointe à la maire de Rennes, déléguée à la santé, et à ce titre, élue à la présidence d’un réseau national d’élus autour de la santé, je ne peux pas avoir un travail à temps plein si je veux suivre mes dossiers. Mais je ne veux pas faire carrière en politique et, d’autre part, mes indemnités d’élue ne sont pas suffisantes pour faire vivre ma famille.
Car au niveau local (contrairement au niveau national), pas de retraite en or, de voiture de fonction et les indemnités ne sont pas toujours très élevées (ça dépend des mandats et des villes/département/région). Et pour les petites communes, il n’y a souvent pas du tout d’indemnités.

Quand il y en a, une partie de ces indemnités est reversée au parti politique (je ne suis pas membre d’EELV mais je reverse car je fais partie du groupe écolo). Au sein de notre groupe à Rennes, on ne cumule pas, et on n’a pas d’avantages en nature (pas de place à l’opéra ou au foot 😉 ) ni d’avantages qu’ont d’autres collectivités (garde des enfants remboursée pour les réunions du soir par exemple) donc chacun se débrouille avec son statut et sa délégation face à un statut à durée déterminée (et heureusement !).
Alors élu.e local.e, quelles sont tes options ?
1/ Continuer à travailler
- en aménageant tes horaires de travail : il faut alors équilibrer ton mandat et ton travail : par exemple tu n’es jamais aux réunions des lundi et mardi, mais c’est acté et donc cela s’adapte en fonction de toi. Pour certains ça marche bien, mais pour les conseillers municipaux c’est plus compliqué car ils doivent s’adapter aux réunions fixées par les adjoints. Cette solution est plus facile pour les fonctionnaires, qui sont donc entre 30% et 55% des élus selon les institutions.
- sans aménager tes horaires de travail, mais alors tu n’es pas du tout aux réunions et pour comprendre les dossiers tu travailles le soir et le week-end (le cas des élus d’opposition)
- en travaillant comme indépendant (mon choix!) avec des contrats ponctuels (quand tu en trouves), et cela implique d’aller travailler si possible en dehors de ta ville pour ne pas cumuler des casquettes, et donc… louper par exemple les assemblées générales et les conseils d’écoles auxquels tu représentes la ville.
2/ Arrêter de travailler
C’est ok si les indemnités sont suffisantes à ton niveau de vie ou si as un-e conjoint-e qui assure financièrement
Si tu es fonctionnaire, tu retrouves ton travail à la fin (et encore tu n’es pas toujours garanti que ce soit la même fonction ou le même lieu). Mais si tu reviens sur le marché du travail tu présentes un trou de 6 ans dans ta carrière, 6 ans de plus en âge, et soyons clairs, avoir fait de la politique n’est pas une recommandation dans le privé.
Et tu n’as pas de chômage.
Donc si tu ne retrouves pas ton travail tu peux :
- essayer de rentrer dans la fonction publique par les concours ce qui est facilité pour les élu.e.s (bonne nouvelle mais on se mord la queue sur la sur-représentation des fonctionnaires)
- faire une carrière politique dans les cabinets politiques
- tout faire pour être réélu, ce qui amène au cumul des mandats dans le temps, et à des politiques professionnalisés qui ne connaissent pas le monde du travail, les entretiens d’embauche, la subordination salariale etc. Bref, c’est la course à l’élection.
3/ Entrer en politique une fois que tu es retraité !
Tout cela contribue au fait que globalement, ouvrières et ouvriers, employé.e.s, artisans, commerçant.e.s sont très peu représenté.e.s parmi les élu.e.s.
Et cela amène à ce qu’en France, 80% des politiques cumulent des mandats : un record mondial !
Rien de nouveau pourtant, et de nombreuses propositions ont été faites, certains partis proposent des systèmes différents… A l’heure où l’abstention gagne toutes les élections, réinventer la démocratie passera par réinventer le statut de l’élu, et de le faire en transparence, avec les citoyens.